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La Belle Hélène

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Théâtre du Gymnase du 2 au 7 septembre 2014
Puis en tournée avant de revenir s’installer à Paris.



L’espoir Belle Hélène

J’ai assisté hier à une présentation de La Belle Hélène, l’opéra-bouffe de Jacques Offenbach, créé en 1864 (il y a donc tout juste 150 ans !), qui sera proposé dans une version très modernisée à la rentrée de septembre au Théâtre du Gymnase avant de partir en tournée à travers la France.

Les cinq tableaux que j’ai vus m’ont littéralement emballé. Pierre-Yves Duchesne, qui en assure la mise en scène, a su à la fois totalement respecter le livret originel et lui donner un sacré coup de jeune. Je pense en effet que tout est réuni pour faire de ce qui fut une des toutes premières comédies musicales un succès intergénérationnel. Voici, dans le désordre, les ingrédients qui me permettent de l’assurer :

1/ La musique d’Offenbach.
La partition de La Belle Hélène comprend quelques tubes qui sont passés à la postérité, ne serait-ce que le fameux « Je suis l’époux de la Reine, poux de la Reine, poux de la Reine… »

2/ Les chorégraphies
Pierre-Yves Duchesne a eu la judicieuse idée d’instiller de la danse urbaine (break dance, hip hop, ragga…) au milieu d’évolutions plus classiques. Ce parti pris apporte une dynamique très actuelle. Aujourd’hui, on ne saurait concevoir un spectacle musical sans faire appel à ce moyen d’expression si prisé du jeune public (et des plus âgés aussi) pour son côté spectaculaire et ses prouesses physiques.

3/ La scénographie
Là aussi, on s’est mis au goût du jour avec l’utilisation de la technique du mapping vidéo en 3D. En projetant des images hautes définition, ce procédé amène une totale liberté et ajoute une grande esthétique à l’aspect visuel de ce spectacle.

4/ L’humour
L’humour, l’ironie et la satire sont des éléments propres à l’opéra-bouffe. Les auteurs du livret de La Belle Hélène, Henri Meilhac et Ludovic Halévy en ont saupoudré les textes des chansons et des dialogues. Pierre-Yves Duchesne y a ajouté une note de burlesque et énormément d’autodérision.


5/ Le casting
Alors là, on ne peut rêver de plus « belle » Hélène que Pauline Bailleul. Elle a tout pour elle : la majesté inhérente à son personnage, le charme, la féminité, la sensualité et, ce qui ne gâche rien, le second degré… Antony Véronèse est un Pâris parfait, un Adonis qui se complaît à jouer au bellâtre avec une gourmandise évidente…Salomé Hadjadj campe une Calchas élégante et pleine de drôlerie… Francisco Gil incarne un Ménélas digne de la comedia dell’arte, frisant le caricatural sans jamais y tomber… Pierre-Yves Duchesne apporte sa prestance et son métier consommé au roi des rois Agamemnon… Et j’ai retrouvé avec grand plaisir Gwendal Marimoutou, dans le rôle d’Oreste ; je l’avais repéré dans la pièce Ados et il avait confirmé ses talents de chanteur dans la dernière édition de The Voice. Un garçon qui ira loin.
Enfin, quelle astucieuse trouvaille que d’avoir confié le rôle de la narratrice à Claude Gensac. La présence de l’épouse de Louis de Funès dans la série des « Gendarme » ne fait que confirmer la volonté de recul et d’humour à cette adaptation.


Pour vérifier tout cela, rendez-vous au Théâtre du Gymnase début septembre. Au Gymnase, il va y avoir du sport, il va y avoir du Sparte…

Mur

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Théâtre de Paris
Salle Réjane
15, rue Blanche
75009 Paris
Tel : 01 42 80 01 81
Métro : Trinité

Une comédie romantique d’Amanda Sthers
Mise en scène par Anne Bourgeois
Scénographie d’Edouard Laug
Lumières de Laurent Béal
Costumes de Mina Ly
Musiques de Jacques Cassard
Avec Nicole Calfan et Rufus

L’histoire : Lui fut colonel. Elle, institutrice. Les deux sont retraités, seuls, beaux et odieux dans leurs égoïsmes, ce qui les fait ressembler à des enfants.
A travers le mur mitoyen de leurs deux appartements, ils se disputent pour défendre leur droit au silence, à la musique, aux odeurs, à la vie… et s’envoient frénétiquement des lettres de protestation qui deviennent bientôt le terrain de jeu d’une haine grandissante.
Jusqu’à ce que la demoiselle rompe l’équilibre de la discorde par une vengeance absurde et néanmoins terrible : profitant d’une absence de son irascible voisin, Elle déplace le mur qui les sépare et lui vole un peu de son espace…

Mon avis : Quelle jolie pièce ! Quel duo ! A la fois un vrai moment de grâce et un grand numéro d’acteurs.
Décidément Amanda Sthers confirme ses grands talents d’auteur moderne. On constate qu’elle les connaît bien ses contemporains. Elle maîtrise parfaitement les psychologies tant féminines que masculines et, surtout, elle possède un sens aigu des dialogues vifs et imagés, ainsi que l’art des formules qui font mouche.


Mur est donc annoncé comme étant « une comédie romantique ». C’est tout à fait vrai. Tous les (bons) ingrédients y figurent. Deux personnages hauts en couleurs avec des caractères bien affirmés se retrouvent à devoir gérer, chacun avec des armes qui lui sont propres, un conflit de voisinage… Tout est plausible, ou presque (je reviendrai un peu plus tard sur ce « presque »).
Le décor est on ne peut plus explicite : côté jardin, la pièce où vit le colonel en retraite ; côté cour, celle où vit l’institutrice à la retraite. Cette mise en scène permet d’aller très vite dans échanges. Car, dès le début, nous assistons à un ping-pong épistolaire dans lequel les échanges sont de plus en plus violents et les balles de plus en plus chargées de poudre…
L’hostilité entre les deux solitaires est de plus en plus palpable, la malignité et la pugnacité de l’une poussant l’autre à ébullition.
Mais, au moins, ça les occupe !


Rufus est remarquable en vieux militaire acariâtre et bougon, rigide et entêté, sûr de son bon droit, un tantinet hâbleur et profondément misogyne. Il nous distille tout un arsenal de mimiques, de gestes et de poses tellement expressifs (mais toujours empreints de subtilité) qu’il déclenche sans cesse les éclats de rire.
Toute en nuances, Nicole Calfan, charmeuse et féminine en diable, campe une vieille demoiselle que la vie n’a pas toujours gâtée mais qui, restée positive, s’impose quelques challenges pour enjoliver son horizon comme réussir à jouer parfaitement La Lettre à Elise au piano… Elle est lumineuse !


L’antagonisme entre ces deux êtres que tout oppose va peu à peu s’édulcorer, s’estomper et ce sont les affres de la solitude qui vont construire une passerelle. D’un affrontement extrême va naître un tout aussi impérieux besoin de l’autre… Rufus et Nicole Calfan vont ainsi basculer de ce qui ressemble au départ à une Guerre des Rose entre voisins en un véritable bain de jouvence qui va les amener à se comporter maladroitement tels des adolescents ressentant leurs premiers émois amoureux. Cette évolution dans les sentiments impose aux comédiens une incroyable palette de jeu. Et ils s’en acquittent avec une justesse et une finesse en tous points remarquables.

Quant au « presque » que j’ai évoqué plus haut, il concerne le postulat quelque peu irrationnel imaginé par Amanda Sthers : permettre à l’institutrice de pouvoir repousser le mur mitoyen pour ainsi diminuer l’espace vital de son irascible voisin tout en augmentant considérablement le sien. Il fallait cette métaphore audacieuse pour relancer la pièce et lui donner grâce à cette licence une autre dimension.

Cette pièce a également pour effet immédiat de nous donner à réfléchir et on sort du Théâtre de Paris en se promettant de prêter plus attention à ses voisin, a fortiori s’ils sont âgés et seuls.
Au lieu de séparer, ce Murest réunificateur. Et vu, pendant et après, les manifestations d’enthousiasme du public, on prend énormément de plaisir pendant une heure et quart. Les sourires d’Alain Delon, Gérard Darmon ou Philippe Lellouche, présents ce soir-là dans la salle, n’ont fait que le confirmer…
A noter aussi la qualité des séquences musicales, genre de musique jazzy bastringue, de ragtime pour film muet burlesque.

Gilbert « Critikator » Jouin


Mistinguett Reine des Années folles

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Big Band Productions / Capitol Music / Universal Music


 En toute honnêteté, j’ai vraiment été enchanté par la qualité des chansons originales qui figurent sur le CD Mistinguett Reines des Années folles. Ces chansons feront évidemment partie de la comédie musicale qui sera présentée au Casino de Paris à partir du 18 septembre.

Si je n’ai pas été surpris par le niveau des textes fignolés par Vincent Baguian, j’ai été en revanche bluffé par les rythmes et le son des mélodies concoctées par Jean-Pierre Pilot et William Rousseau. Les huit titres qu’ils ont réalisés sont d’une excellente facture et correspondent parfaitement à l’esprit de ces « Années folles ». Sincèrement, il fallait le faire !
Lorsque j’ai mis le CD sur la platine, je ne connaissais que les quelques chansons entendues à la radio ou découvertes lors du show case du 3 juin. Mais lorsqu’on écoute l’intégralité de l’album, on ne peut que tomber sous le charme et ressentir une irrépressible envie de  frétiller des gambettes.
Au moins, pour ce qui est de la bande son, le spectacle est déjà assuré.

Ma chanson préférée est Oser les larmes. La mélodie, très jazzy, vous pénètre dans le cortex, l’envahit, et s’y installe sans aucune gêne. Et puis il faut mettre en exergue la prestation de Stéphane Chausse à la clarinette.


Ensuite, j’ai adoré Con-vain-cu. Le seul (petit) reproche que je lui fais, c’est l’abus de féminines en fin phrase : devoir prononcer les « e » muets écorche un tantinet la perception… Mais la chanson est une réelle réussite. Elle est délicieusement osée et provocante, remarquablement interprétée par Carmen Maria Vega et, là aussi, la présence des cuivres, trompette et saxo, est un vrai plus.
En trois, je place Paradis illico. Sur ce titre qui avance tout le temps, Alain Chamfort est venu apporter sa contribution. C’est une chanson vraiment formatée « comédie musicale », une évidente chanson de scène.
Excellente chanson de scène également, Dingue des Années folles, nous installe dans une ambiance tonique et festive à souhait. Swing, voix distordues, le traitement est très américain.

Mais j’aime presque autant la Valse de la chance, jolie valse lente au climat chargé de mélancolie qui traduit parfaitement l’état d’esprit du personnage. Et puis, au niveau de l’écriture, le Baguian s’est astucieusement ingénié à y glisser des sonorités en « passe » en clin d’œil à la roulette… Après, dans l’ordre préférentiel, viennent Drôle mambo pour son atmosphère, L’Homme infâme et Le seul vrai boss ici-bas pour son ambiance bastringue et la qualité de ses chœurs.

Bien sûr, je ne m’attarde pas sur les trois chansons d’époque, Mon homme, C’est vrai et Je cherche un millionnaire, des standards quasiment centenaires qui font partie du patrimoine et qu’on ne présente plus.

Maintenant, il faudra attendre le 18 septembre pour juger de la qualité du livret et de l’histoire. Mais, ce qui est déjà certain, c’est que les chansons tiendront formidablement leur place.



Le Point Virgule fait l'Olympia et Bobino

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Le Point Virgule a fait l’Olympia et Bobino


Les 12, 13 et 14 juin, a eu lieu la septième édition de ce rendez-vous désormais incontournable pour les amateurs d’humour, de bon humour. De même qu’il existe un Printemps de la Chanson, cette manifestation pourrait être sous-titré « le Printemps de l’Humour ».
Dix jeunes artistes passés par ce creuset de talents que sont le Point Virgule et, plus récemment, le Grand Point Virgule, sont venus présenter un sketch dans ces salles prestigieuses que sont l’Olympia et Bobino. Le fait d’avoir été sélectionné pour faire partie de ce programme est un signe fort de reconnaissance.


Hier soir, je me trouvais donc à Bobino et je peux affirmer que, décidément, l’humour se porte vraiment bien en France. Les humoristes à l’affiche proposaient une palette de jeu très variée et, surtout, d’un excellent niveau, tant dans l’expression que dans l’écriture.
Intronisé maître de cérémonie, Ben, a fait une fois de plus étalage de son insolente maîtrise de l’absurde. Très élégant dans son smoking, il nous a encore sorti des phrases alambiquées et des digressions saugrenues qui n’appartiennent qu’à lui (j’ai adoré son détournement : « Pas de break, pas de chocolek !...). Son échange autour de l’histoire de Bobino avec Christine Berrou était absolument désopilant. Ben a pris une belle envergure dans le panorama de l’humour français. Je pense qu’il n’a pas fini de nous surprendre.


Dans ce programme, parmi de jeunes pousses, figuraient néanmoins quelques artistes déjà confirmés. On ne présente plus Vérino. Il fait un carton tout-à-fait justifié partout où il se produit. C’est une valeur sûre.
Il y avait Tanoaussi, dont j’avais déjà vu deux spectacles. Au fur et à mesure de ses prestations, il s’affirme de plus en plus. Il prend de plus en plus d’aisance, il va de plus en plus loin. Son humour, toujours bien écrit, est corrosif, osé, anticonformiste et il joue de mieux en mieux. A suivre, et de près…


Les autres artistes, je les connaissais un peu ou pas du tout. Les voici par ordre d’entrée en scène :
Fary m’a vraiment bluffé. En plus de son accoutrement improbable mais visiblement très étudié, il sait tout faire avec son corps. Il a une présence incontestable. Avec un air de ne pas y toucher, passant son temps à s’excuse avec son leitmotiv à l’adresse du public « Soyez pas méchants », il énonce et dénonce des vérités qui ne sont pas toujours bonnes à dire. Son humour est très fin, subtil. Avec un ton distancié, il aborde des sujets aussi épineux que le communautarisme, le racisme et… les filles. C’est très gonflé, et ça fait mouche à tous les coups. Une authentique révélation et un potentiel énorme. C’est un personnage.
Marc-Antoine Le Breta su lui aussi m’amuser et, surtout, me surprendre. Des imitateurs, j’en ai croisés énormément et même accompagnés certains. Marc-Antoine m’a intéressé par sa façon intelligente d’amener ses imitations. Du jamais vu. Rayons voix, il nous a cloné des gens dont on n’a pas beaucoup l’habitude : Laurent Deutsch, André Manoukian, Benjamin Castaldi, Denis Brognart, les frères Bogdanov… Il est très facile, il a du charisme et ses textes sont remarquablement ciselés.



Alors lui, c’est mon gros coup de cœur ! Antoine Schoumsky va très rapidement faire partie de nos têtes d’affiche. Je l’avais déjà repéré dans On n’ demande qu’à en rire sur France 2. Chacune de ses prestations a été marquée du sceau de l’originalité. Il sait à ravir interpréter les personnages inquiétants, les psychopathes, les débiles plus ou moins légers. Son visage est très expressif et il possède la gestuelle d’un véritable acrobate. Artiste complet, il s’inscrit dans un registre bien à lui qui repose sur un humour très, très noir, voire féroce. J’ai hâte de découvrir son one man show dans son intégralité.

Bouchra aussi est étonnante par l’éventail de ses capacités. Non contente de savoir nous faire rire, elle danse à merveille, elle possède tout un arsenal de mimiques imparables et un sourire dévastateur. Très féminine, elle raconte son enfance, égratigne ses camarades d’école, revendique ses origines algériennes, s’en amuse et, avec beaucoup de pertinence et d’impertinence, ne tombe jamais dans le communautarisme. Une très belle présence.
Céline Lelièvreest pour moi un cas à part. Les fées se sont visiblement attardées sur son berceau pour la fignoler. Très jolie, agréable à regarder, bonne tchatcheuse, c’est une remarquable danseuse de hip-hop. Elle se livre à un cours collectif avec leçon de gestes et apprentissage du jargon hip-hopien. C’est convivial, interactif, mais ça trouve difficilement sa raison d’être dans un spectacle réservé à l’humour. Elle a néanmoins le mérite de se livrer avec une belle générosité.
Alex Barbe, je l’avais déjà entraperçu. Avec une espèce de nonchalance et une allure de premier de la classe, il pratique un humour corrosif, frontal, délicieusement dérangeant. On sent qu’il des choses à dire et la façon de les dire. Un garçon très prometteur.
Farid Chamekhaussi ne m’était pas totalement inconnu. Il fait également partie de ces artistes complets qui savent tout faire. Souriant, sympathique, très à l’aise avec son corps, il possède une grosse présence. Il a visiblement un métier déjà affirmé. Il donne lui aussi envie d’en voir plus.


Enfin, Christine Berrou est une de mes belles surprises de cette soirée. Déjà, au cours de ses saynètes farfelues avec Ben, je l’avais trouvée vraiment drôle. Elle a une façon quasi innocente de balancer vannes et vacheries. Elle possède surtout une très belle écriture. Lumineuse, fine, pratiquant à ravir l’autodérision, elle est particulièrement efficace dans le second degré. Avec une telle plume, une présence aussi charismatique et sa voix de petite fille elle devrait aller très loin.


Voilà. Elle était pas chouette ma soirée ?...

Baptiste Giabiconi "Un Homme libre"

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Be 1st / Smart / Sony Music
(Sortie le 16 juin)


Il y a longtemps qu’un jeune chanteur n’avait réuni autant d’atouts. Baptiste Giabiconi a décidément tout pour lui. Non seulement il est beau, très beau même, mais en plus il chante vraiment bien le bougre. Il y a là de quoi donner à rêver aux gamines, aux jeunes filles et à leurs mamans. Un beau mec qui chante bien !...

On pouvait subodorer de sa part un album un peu superficiel composé de chansonnettes appartenant plus à la confection qu’à la haute couture, or Un Homme libre s’avère être tout à fait honorable. Ce n’est certes pas un album engagé, mais les textes et les sujets traités ne sont pas mièvres. On sent de la part de Baptiste un réel investissement. Il a voulu que cet opus soit le fidèle reflet de ses idées. Le fait qu’il ait écrit ou coécrit plus de la moitié des textes entraîne automatiquement une profonde sincérité dans ce qu’il chante. Autre chose : le fait qu’il cite Renaud parmi ses influences prouve que Baptiste Giabiconi n’a pas envie de faire dans la bluette.


Baptiste possède donc un joli brin de voix, avec un grain intéressant. C’est un bon interprète, il sait faire passer ses sentiments et ses intentions. Sans doute par recherche de l’efficacité, il a opté pour des chansons plutôt courtes, ce qui est rare (ça va de 2,31 mn à 3,35 mn) et il s’est appliqué à retenir des mélodies dont les refrains entrent bien dans la tête.  Les orchestrations et les arrangements sont bien élaborés. C’est vraiment du travail soigné.

Je n’ai pas tout aimé dans cet album (Embrasse-moi, Je t’adore…), mais il y a sept chansons que j’ai trouvées plutôt à mon goût. Les voici, dans mon ordre préférentiel :

1/ La fille d’hiver
Une très douce mélopée, réellement bien interprétée, dans le souffle. C’est plein d’émotion, sans pathos. Très agréable avec son discret tapis de cordes.

2/ Un Homme libre
Le texte, signé Lionel Florence, est fort bien écrit. J’aime beaucoup cette véhémence mise dans le ton. C’est une sorte de profession de foi déclarée sous une forme qui frise le rap. Baptiste revendique l’image qu’il veut donner de lui. La voix est très devant, énergique. Et cette chanson contient des petits gimmicks musicaux assez sympathiques.

3/ C’est ta route
Texte intelligent sur la transmission qui n’est pas sans rappeler le fameux « Tu seras un homme mon fils » de Rudyard Kipling. La mélodie est efficace.


4/ Petit ange
Chanson pleine de sensibilité sur la perte et l’absence d’un être cher. Là aussi, Baptiste évite l’écueil de la sensiblerie en nimbant la douleur de retenue. Belle guitare acoustique, jolies cordes, c’est vraiment réussi.

5/ Demain
Jolie ritournelle pour une chanson positive et entraînante. Belle idée dans la construction musicale que ces petites parenthèses fredonnées en valse lente. Quant au thème, fédérateur, il devrait avoir un bel impact sur scène.

6/ Je t’emmène avec moi
Le refrain est redoutable d’efficacité. Le jeu avec les chœurs et l’idée de doubler la voix sur certains passages est très agréable à attendre. C’est vraiment une jolie chanson d’amour toute simple.

7/ Elle est celle
J’aime beaucoup cette mélodie tour à tour « sucrée » et « salée », l’arrangement frise la musique bastringue sans jamais y basculer. Reste une chanson sautillante et primesautière qui clôture fort plaisamment cet album.





Nicola Frassanito

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Ce métier a ceci de gratifiant qu’il permet de faire des rencontres, beaucoup de rencontres. Et, parfois, celles-ci prennent un caractère exceptionnel.
Par l’entremise d’un ami attaché de presse, François Deblaye, j’ai ainsi été amené à faire la connaissance d’un personnage hors du commun, Nicola Frassanito. Aujourd’hui âgé de 59 ans, cet homme a accompli une trajectoire incroyable qui fascine et force le respect. Moi qui me passionne pour les aventures humaines, avec lui, j’ai été gâté au-delà de toute mesure. Mais, avant de résumer son parcours, je tiens d’abord à préciser que j’ai rencontré un homme authentique, simple et naturellement généreux. A ce niveau, c’est rarissime.

Avec lui, la formule « parti de rien », n’est pas galvaudée. Ses parents, émigrés du sud de l’Italie, son venus s’installer dans les Alpes de Haute-Provence. Le père est maçon. Dès son plus jeune âge, Nicola Frassanito, aîné d’une fratrie de cinq garçons, a la foi chevillée au corps. C’est tout naturellement qu’il entre au Petit séminaire avec pour unique ambition devenir Pape ! Et rien d’autre. Mais le baiser d’une fille allait étouffer dans l’œuf cette noble vocation. C’était trop doux, trop intense ! Une telle révélation rendait incompatible le vœu de chasteté…
Il quitte alors le Petit séminaire pour le collège. En seconde, il choisit l’option… sténo-dactylo (!) et se retrouve seul garçon au milieu de trente filles. En parallèle, il est amené très tôt à épauler son père dans ses travaux. Bac en poche, il n’hésite pas une seconde : il sera maçon comme papa. Mais comme, déjà, il ne fait rien comme tout le monde, il crée sa propre société avec son père et un de ses frères. Au début, les affaires sont florissantes. Avec ses dix employés, la boîte gagne de l’argent. Jusqu’à ce que survienne la crise immobilières. Des projets trop ambitieux et des investissements dispendieux mènent droit au dépôt de bilan. Le gérant qu’il est assume ses responsabilités. Il prend toutes les dettes à sa charge. Il mettra cinq ans pour les éponger jusqu’au dernier centime.


Fini le bâtiment. Nicola doit faire vivre sa petite famille car il s’est marié et il a une petite fille, Olivia. Mais, pour compliquer encore plus les choses, il est tombé éperdument amoureux de Véronique… Il répond à une petite annonce et se retrouve engagé comme commercial par une société marseillaise de courtage. Il s’occupe de contrats d’épargne retraite. Mais lui, il ne s’épargne pas. Pendant trois années consécutives, il est élu Meilleur commercial. Commercial, c’est sa seconde nature. L’homme est convivial, persuasif et, ce qui n’est pas courant dans ce métier, il est honnête et sincère avec ses clients… Professionnellement, il commence à redresser la barre, sentimentalement, il est à la croisée des chemins. Il va se séparer de son épouse pour vivre avec Véronique… Il quitte aussi sa société de courtage et le voici garçon de café à Manosque. Bluffé par son sens du contact et son efficacité, son employeur lui conseille de tenter l’aventure avec son frère qui est en train de monter une société de compléments alimentaires.

Voici de nouveau Nicola commercial. Mais pour être entièrement libre (un mot vital dans sa conception de gérer son existence), il ne veut être rémunéré qu’à la commission. Il court les routes de France, parcourt dix mille kilomètres par mois, multiplie les rencontres et se construit un carnet d’adresses très conséquent. Sous son impulsion, le chiffre d’affaires de la société est multiplié par trente. Cette collaboration va durer une quinzaine d’années. Quinze années immensément formatrices. Nicola n’a plus rien à prouver et, surtout, à SE prouver. Le temps est venu de voler de ses propres ailes. Le milieu de compléments alimentaires lui plaisait, il en connaissait tous les rouages. La suite logique, évidente, était donc de créer une société bien à lui. En avril 2004, naît PhytoQuant. Le siège de la société se trouve à Monaco, où il réside déjà. Il reprend son bâton de pèlerin pour visiter les thérapeutes pendant que Véronique s’occupe de la logistique.
Le respect de la clientèle avec des produits fiables, validés par des sommités du monde médical et de la pharmacologie, sans cesse perfectionnés, enrichis, voire transformés, et le charisme hors norme de son patron font connaître à PhytoQuant un succès planétaire. La force de Nicola est aussi d’avoir su s’entourer. Il se sent en sécurité et en totale confiance avec sa précieuse garde rapprochée formée de Véronique, de sa fille Olivia et de son beau-fils Julien.
La boîte tourne remarquablement mais Nicola ne s’endort pas sur ses lauriers. Il évolue sans cesse, recherche des innovations. Il a donné une petite sœur à PhytoQuant, Solavie, une gamme de produits cosmétiques 100% naturels.


Or, Nicola Frassanito n’est pas qu’un inlassable travailleur. Il est également – c’est dans ses gènes – un artiste-né. Comme la plupart des émigrés italiens il a la chanson chevillée à l’âme. Frank Sinatra, Salvatore Adamo, Frédéric François, Roberto Alagna en sont les plus célèbres exemples. Nicola a vu les maçons chanter à tue-tête sur les chantiers ou les échafaudages, il était tout naturel qu’il en fît autant. Il est né avec deux bosses : celle du commerce et celle de la chanson. Il chante tout le temps et n’importe où. Il a même réussi à associer le métier et sa passion à l’occasion d’une conférence donné devant cinq cents professionnels en la clôturant par un tour de chant. Du jamais vu dans le monde hypra-sérieux des thérapeutes. Ce happening a eu lieu le 25 septembre 2011 au Trianon. Une vidéo et un CD en sont issus. Un CD de 13 chansons, intitulé Et pourquoi pas ?, un titre qui résume la philosophie de vie de Nicola.

Nicola Frassanito est réellement un personnage hors du commun. C’est un humaniste qui s’est construit sur des critères intangibles : la sincérité, la générosité, le sens et le respect du travail, l’intuition, le perfectionnisme avec, en permanence à l’esprit, un profond désir de liberté. Il admet qu’il faut parfois compter aussi sur la chance, mais qu’elle ne suffit pas si on n’a pas l’aptitude à l’exploiter et, enfin, il croit au rêve ; aux rêves…
Mais à l’écouter, ce dont il est visiblement le plus fier, ce sont ses 28 ans d’amour avec Véronique, à la fois femme, confidente, complice et associée.
Nicola Frassanito est un homme de cœur, un exemple, un modèle. Quelqu’un de très rare.




Les Nombrils

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Théâtre Michel
38, rue des Mathurins
75008 Paris
Tel : 01 42 65 41 30
Métro : Havre-Caumartin / Saint Augustin / Auber

Une comédie de Didier Caron
Mise en scène par Didier Caron
Décors de Nils Zachariasen
Costumes de Claire-Rose Daguerre
Lumières de Geneviève Soubirou
Avec Isabelle Feron (Nanette Leduc), Philippe Gruz, Bruno Paviot (Stanislas), François Raison (Brice Morin), Jane Resmond (Astrid), Christophe Rouzaud (Jean-Pierre Bramont)

L’histoire : Ils sont « La Compagnie de la Lune Pleureuse ». Ils interprètent Les Plaines de Kiev, une pièce russe d’un auteur dont on n’a jamais compris le travail ! Ces comédiens se prennent très, très au sérieux, alors qu’ils ne devraient pas ! Nous suivons leurs Nombrils dans des halls d’hôtels piteux au cours d’une tournée qu’aucun qualificatif ne saurait décrire…

Mon avis : Didier Caron est un artisan, un bon faiseur. Il a sa patte à lui. Toutes ses comédies sont concoctées avec des ingrédients immuables : beaucoup d’humain, une bonne dose de burlesque, une pincée de satire et, toujours, un zeste de tendresse. Il procède comme un peintre, à petites touches. Il ne cesse d’en rajouter jusqu’à ce qu’il ne reste aucun « blanc » sur sa toile. Et, là seulement, il est satisfait. Ses pièces sont un Vrai bonheur mais un faux Monde merveilleux car on butte systématiquement sur Un pavé sournoisement jeté dans la cour.
Les Nombrils n’échappent pas à cette règle. Il s’en prend cette fois à un monde qu’il connaît bien, celui des comédiens de théâtre. Avec un pinceau trempé dans du vinaigre (ce qui est adéquat lorsqu’on dépeint une poignée de cornichons), il décrit les tribulations d’une troupe de cinq comédiens absolument ringards, mais qui croient que le milieu du théâtre gravite autour de leurs « nombrils ». Le doute, ils ne connaissent pas !


Dans cette pièce, Didier Caron a établi une sorte de mouvement perpétuel. La trame repose sur un comique de répétition avec des situations qui sont toujours les mêmes (c’est le lot de toutes les troupes d’artiste), mais qui s’enrichissent régulièrement d’avatars. Si bien que l’on se met à attendre ce qui va pouvoir se passer dans la prochaine ville-étape. Comme, au fur et à mesure, on connaît de mieux nos cinq protagonistes, on suit, voire on précède, leur évolution. C’est un travail tout en finesse, une couche s’ajoutant à une autre sans effacer pourtant les précédentes. Et puis on se réjouit à l’avance de voir la prestation de Philippe Gruz, qui interprète à chaque fois le veilleur ou le gérant de l’hôtel de troisième ordre dans lequel les comédiens descendent. Ses compositions sont impayables et elles comptent pour beaucoup dans la drôlerie de la pièce. Ses accoutrements, ses travestissements, ses accents inhérents à la région dans laquelle l’établissement est situé (ch’ti, alsacien, corse, belge…) constituent un réjouissant gag récurrent.

Didier Caron excelle pour brosser les portraits. Le caractère de chacun de ses cinq « Nombrils » est parfaitement dessiné. Ce sont, chacun dans sa pathologie, des cas.

On ne se moque bien que de ce qu’on aime. Nanette Leduc (Isabelle Ferron) joue les divas. Convaincue qu’elle est sortie de la cuisse de Dionysos, le dieu grec du théâtre, elle s’arroge le droit d’être capricieuse, susceptible et fantasque… Jean-Pierre (Christophe Rouzaud), en vieux routard qui est revenu de tout sans être parti très loin, est un cumulard ; il est ronchon, aigri, alcoolique et obsédé sexuel… Astrid (Jane Resmond), est celle qui mérite le plus de circonstances atténuantes. C’est l’archétype de la nunuche. Elle est en permanence dans le premier degré, elle possède un langage bien à elle agrémenté de fautes de français et elle ne possède pas une once de méchanceté… Brice Morin (François Raison) et Stanislas (Bruno Paviot) sont vraiment les plus gratinés. Le premier, qui a la responsabilité de mettre en scène cette pièce aussi hermétique qu’affligeante, prend son rôle et ses responsabilités très, très au sérieux. Il utilise un langage pompeux et châtié, très vieille France. Il passe avec une insolente facilité de l’exaltation à l’abattement… Quant au second, il est, de loin, le plus caricatural. Stanislas est le fayot-étalon ; onctueux, précieux, complètement habité, fat car sûr de son pseudo talent, il est convaincu d’incarner le théâtre à lui tout seul. En même temps, c’est un gros bosseur qui ne vit que pour son art (on peut dire que ce "Nombril" a vraiment du coeur au ventre). Il en fait des caisses, il sur-joue, mais il est tellement sincère qu’il en deviendrait presque attachant…

Pour interpréter de tels ringards, il faut drôlement bien jouer. Et tous sont vraiment épatants.
Quant à Didier Caron, on ne peut penser une seule seconde qu’il é écrit cette pièce pour se moquer des comédiens. Au contraire. Il est parti de ce principe qu’on ne peut bien se moquer que de ce qu’on connaît bien et, surtout, de ce pourquoi on est passionné. Dans son regard amusé et critique, il y a énormément de tendresse.


Gilbert « Critikator » Jouin

La Bande à Renaud

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Mercury / Universal

L’écoute de cet album permet au moins une chose : avoir la confirmation de l’immense talent d’auteur de Renaud. Renaud est unique dans son genre. Il fait partie des tout grands de la chanson française. Le sillon qu’il y a creusé est tout sauf micro ; il est méga important.

A un moment où on ne sait toujours pas si Renaud écrira de nouvelles chansons, voire les interprétera, il était de bon ton de le rappeler à notre souvenir. Il a tant compté et compte toujours autant pour plusieurs générations.
Et c’est justement la génération actuelle d’artistes qui, sur une initiative même du « chanteur énervant », a enregistré une sorte de « tribute » pour leur rendre hommage, à lui et à son Œuvre. Comme c’est l’intéressé lui-même qui a choisi ses interprètes, on a tout simplement baptisé cet album « La Bande à Renaud »…
Non, non, non, Le Renaud n’est pas mort, car il « bande » encore !


Ces artistes, qui ont ainsi repris à Renaud ses chants, sont au nombre de 15 pour 14 chansons. En effet, ils se sont mis logiquement à trois pour interpréter Je suis une bande de jeunes, Renan Luce, Alexis HK et Benoît Dorémus, trois petits protégés de Renaud.
Même si on est un inconditionnel de Renaud, force est de reconnaître que cet album est inégal. Il n’est pas facile de rentrer dans l’univers si particulier de l’hexagonal chanteur et de se l’approprier.
Paradoxalement – mais ceci n’engage que moi -, j’ai trouvé que les meilleurs interprètes de Renaud étaient les femmes.
J’ai été par exemple complètement bluffé, moi qui ne suis pas un « Brunidolâtre », par la version que Carla Bruni a produite de C’est quand qu’on va où ?. C’est pour moi le plus beau moment de cet album.
Et, tout de suite après elle, je classe dans mon ordre préférentiel Nolwenn Leroy (La Ballade nord-irlandaise), Cœur de Pirate (Mistral gagnant) et Elodie Frégé (Il pleut). Finalement, ce sont sans doute les femmes qui comprennent le mieux l’extrême sensibilité de l’homme et sont ainsi plus aptes à la restituer.


Chez les garçons, mes préférences vont vers Hubert-Félix Thiéfaine (En cloque), Benjamin Biolay (Deuxième génération), Grand Corps Malade et son intelligente interprétation de La Médaille, et Bénabar (La pêche à la ligne)… A noter aussi la superbe orchestration de Hexagone (Nicola Sirkis).
Et j’aime bien aussi le graphisme de la pochette et du livret.

Un hommage, surtout de son vivant, c’est bien, c’est sympa. D’autant qu’il y a de vraiment belles choses à entendre. Mais la voix de Renaud et ses intonations si personnelles viennent en permanence s’imposer en filigrane. Du coup, ça ravive le manque…
Alors il ne nous reste plus qu’a attendre un vrai nouvel album.
Un album futur.
Un Renaud futur.
Un No futur ?
Pour lui, ce n’est pas « Putain de camion ! » qu’il faut gueuler, mais plutôt « Putain de pastis » !
Allez mon Poteau, on t’attend, on t’espère.

Mais surtout, porte-toi bien…

Théâtre de Paris Rentrée 2014-2015

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Le Théâtre de Paris a présenté son programme pour la rentrée 2014-2015. Comme c’en est devenu désormais l’habitude, il y a du lourd, voire du très lourd.
Si l’on voulait mettre le Théâtre de Paris en bouteille, on peut déjà affirmer que ce millésime va être un très grand cru.
Voici donc, par ordre d’entrée en scène, ce qui va nous être proposé au 15 de la rue Blanche :

1/ Du 27 août 2014 au 6 janvier : Des gens intelligents.
Je salive à l’avance à l’idée de découvrir cette nouvelle pièce de Marc Fayet, un auteur dont les précédentes pièces m’avait enchanté (Jacques a dit, L’un dans l’autre, Le Scoop…). On sait déjà que ça va être fort bien écrit et puis, lorsqu’on en découvre l’affiche, on ne peut que s’attendre à prendre beaucoup de plaisir. Cornaqués par José Paul, Lisa Martino, Lysiane Meys, Marie Piton, Marc Fayet, Gérard Loussine et Stéphan Wojtowicz vont pouvoir s’en donner à cœur joie… Pour moi, cette comédie va constituer un des grands rendez-vous de cette rentrée théâtrale.

2/ Du 9 septembre au 11 octobre 2014 : Sahar et Jérémy.
J’ai eu la chance de découvrir ce « seule en scène » écrit et interprété par Aurore Auteuil au Petit Hébertot et j’en garde un souvenir intense. Ce fut un véritable choc émotionnel. La prestation de la jeune comédienne est proprement époustouflante. Dans la peau d’un garçon, elle nous happe dès le début et l’on reste scotché à son histoire jusqu’à la fin. Bien après la fin même tant elle est habitée par ses personnages. Un très grand moment de comédie pure à ne manquer sous aucun prétexte.

3/ Du 14 octobre 2014 au 25 janvier 2015 : Kinship.
En raison de la présence à l’affiche d’Isabelle Adjani, cette pièce va être l’évènement médiatique de la rentrée. Elle a été écrite par Carey Perloff, une Américaine née en 1959. Elle est présentée comme étant « une histoire de passion et de transgression où se mêlent vie intime et sphère professionnelle sous le double signe de la comédie et de la tragédie ». Les partenaires d’Isabelle Adjani sont l’immense actrice espagnole Carmen Maura et la jeune révélation masculine de Roméo et Juliette, Niels Schneider. Tous les feux sont au vert pour cette pièce qui s’annonce intrigante.

4/ Du 16 octobre au 21 décembre 2014 : Splendour.
Annoncée comme étant « une descente aux Enfers à travers le sexe, l’alcool, le glamour, en passant par le cœur d’une femme glorieuse et perdue », ce « seule en scène » écrit par Géraldine Maillet va voir Elsa Zylberstein se glisser dans la peau de l’actrice mythique Natalie Wood quelques heures avant sa mort tragique… Avec Hollywood en toile de fond, il faut là aussi s’attendre à vivre des moments d’une grande intensité.

5/ Du 3 février au 22 mars 2015 : Nos femmes.
On ne présente plus cette pièce qui fut un des cartons de la saison précédente… Mais ce qui peut de nouveau nous la rendre attrayante, c’est la présence de Jean Réno dans le rôle créé par Richard Berry alors que Richard Berry, histoire de se régénérer, va jouer le personnage qu’incarnait Daniel Auteuil. Nouveau succès garanti…

Olivier Villa "Derrière le rideau"

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J’aime beaucoup la démarche artistique d’Olivier Villa. Il ne trace pas un chemin classique. Un peu à la manière des troubadours d’antan, c’est lui qui se déplace, qui va vers les gens. Il est, dans le sens noble du terme, un vrai chanteur populaire. C’est un garçon sincère, authentique, sensible, fragile. Il ne triche pas. Il est bien trop fier pour ça. Il fait son métier de chanteur comme un artisan.

Son parcours, pas facile, a été semé d’embûches. La galère, il a connu. On peut même mettre le terme au pluriel. Mais il a la chanson chevillée à l’âme. Quand le premier titre que l’on ose interpréter en public à 19 ans est Une jolie fleur de Georges Brassens, cela vous situe d’emblée chez les gens de goût.
Doté d’une jolie voix, bien timbrée, Olivier Villa est tout autant un excellent mélodiste qu’un bon parolier. Son langage est direct, sans fioritures. Il alterne agréablement chansons festives et chansons mélancoliques. Ce sont ces deux traits de caractère qui le définissent le mieux. Olivier est tout autant dans la demande que dans le don d’amour. Doté d’un solide sens des valeurs et du partage, il est tout à fait naturel que les gens simples aillent vers lui, se retrouvent en lui. Il est des leurs.


Entouré de musiciens de bal, il fait la tournée des villages. Olivier n’est pas un chanteur urbain, c’est un chanteur rural. Et il y tient. Il suffit d’écouter sa profession de foi dans les mots de Ma Dordogne. Son dernier album (autoproduit), Derrière le rideau, est plutôt réussi. Les musiques sont variées, il passe sans problème du rock au musette. Ses chansons s’adressent à tous. Même si, parfois, il se met le cœur à nu, comme dans L’histoire est belle, une superbe chanson autobiographique où les douleurs et les chagrins se le disputent à la réussite professionnelle et à la ferveur du public.  Il a de l’humour aussi et le sens de la pirouette (Le mari de ma femme, Le petit cachet bleu), il peut être cru comme dans Chanter danser autant qu’il peut se montrer tendre comme dans Mamie Groseille. Et, surtout, il sait dire merci à ceux qui se déplacent pour venir l’applaudir (Fan de toi). Il sait ce qu’il leur doit. Il vit pour eux et par eux.


Si ma chanson préférée reste L’histoire est belle, j’ai beaucoup apprécié J’invente rien. Il y rend un vibrant et reconnaissant hommage à ces grands aînés qui l’ont façonné : Brassens, Brel, Gainsbourg, Dassin… Qu’il le veuille ou non, il a dans ses gènes un héritage qu’il ne peut nier. Grâce à son géniteur, il a la chanson dans le sang et bon chant ne saurait mentir…
D’ailleurs, la page de remerciements qui figure sur le livret de son album est signée Olivier Boutot… Boutot ?...  Ne serait-ce pas le vrai patronyme de Patrick Sébastien ?



Frangines

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Théâtre Trévise
14, rue Trévise
75009 Paris
Tel : 01 48 65 97 90
Métro : Cadet / Grands Boulevards

Une pièce de Juliette Arnaud et Samantha Benoit
Avec Juliette Arnaud (Gabrielle) et Samantha Benoit (Adèle)
Mise en scène de Gil Galliot

L’histoire : Gabrielle, maniaque de l’ordre et dans le contrôle permanent, a choisi un « célibat ambitieux » à Paris ; alors que sa sœur Adèle a opté pour la formule « femme au foyer » dans un petit village du Sud de la France, près de chez leurs parents. Entre elles deux, la communication est périlleuse. D’autant plus lorsqu’Adèle débarque à l’improviste chez Gabrielle pour la convaincre de passer Noël en famille !

Mon avis : Le décor est révélateur du caractère de Gabrielle. Son appartement parisien, dans lequel va se dérouler l’action, est d’une propreté impeccable. Deux grandes bibliothèques témoignent de son amour des livres. On en déduit très vite que la jeune femme est aussi maniaque que cultivée. Sa quiétude d’un soir – à la veille d’un départ pour un long voyage en Asie où elle doit donner une conférence en deux langues – est soudain brutalement bouleversée par l’irruption de sa sœur cadette, Adèle, qu’elle n’a pas vue depuis deux ans. Visiblement, elle n’est pas ravie de la revoir. Mais, à force de comédie, de mensonges, de stratagèmes éhontés, Adèle va réussir à taper l’incruste. La nuit promet donc d’être particulièrement agitée entre deux « frangines » que tout oppose.

Gabrielle, la working girl parisienne, et Adèle, la mère au foyer provinciale, sont aux antipodes l’une de l’autre. La première est carrée, d’une méticulosité qui frise la pathologie, sa vie de célibataire assumée est réglée comme du papier à musique. La seconde est un tantinet immature, exubérante, bordélique et pas du tout inhibée. Gabrielle, qui a refusé de « mourir d’amour enchaîné », ne voudrait pour rien au monde de « la vie d’Adèle »…. Entre elles deux va commencer une sorte de bras de fer dans lesquels les muscles sont remplacés par ces forces de l’esprit que sont la malice, les affabulations, la duplicité, la fourberie, toutes ces armes dont est généralement dotée la gent féminine… Laquelle va l’emporter ? Gabrielle va-t-elle réussir à dormir un peu ?


Les deux jeunes femmes nous embarquent dans un véritable combat à fleurets non mouchetés. Pour piquer, ça pique ! Chacune, en fonction de son tempérament, a sa tactique. Mais il n’est pas toujours aisé de surprendre l’adversaire quand on se connaît par cœur puisqu’on a grandi ensemble…
Juliette Arnaud et Samantha Benoit, qui jouent la pièce qu’elles ont écrites à quatre mains, se sont dessiné deux rôles parfaitement antagonistes. Juliette s’attribue celui du clown blanc et Samantha celui de l’Auguste. Comme elles s’y tiennent dans déraper une seconde tout au long de la pièce, leur confrontation se laisse regarder avec une réelle jubilation. Au calme et à la froide volonté de Gabrielle, Adèle va opposer sa fougue et son brin de folie. Pour se tenir à un tel jeun ininterrompu d’attaque-défense, il faut une sacrée complicité. Sinon, ça ne passerait pas la rampe. Chacune doit faire aveuglément confiance à sa partenaire. Et ça marche remarquablement. C’est huilé. Les dialogues sont joliment troussés, les répliques fusent, les vacheries sont de bon aloi, les formules font mouche. Il n’y a pas de round d’observation, pas une seconde de répit.

La qualité de cette pièce, c’est qu’elle n’est pas que drôle. Les deux filles ont su judicieusement insérer des petites ruptures : lancer ça et là une pincée de nostalgie, glisser un zeste de tendresse. Quand il leur arrive de baisser la garde, on sent que leur enfance partagée n’est pas tout à fait effacée. Elles se sont construites là-dessus. Et, surtout, elles ont grandi en opposition à une mère particulièrement fantasque qu’elles qualifient carrément d’« infernale » mais pour laquelle elles nourrissent néanmoins une affection gentiment moqueuse.
Sincèrement, c’est vraiment bien écrit. Et puis nos deux « frangines » se livrent chacune à une jolie composition. On se plaît à voir jusqu’où chacune est capable d’aller pour déstabiliser l’autre.
Et il faut bien admettre que l’on se sent aussi plus ou moins concerné par les différents exposés sur scène. Chaque famille a ses petits secrets enfouis, ses divergences de vue, ses faits vécus à l’identique mais perçus différemment, ses griefs, ses jalousies… mais aussi un même terreau d’amour qu’il suffit de savoir entretenir pour qu’il puisse ré-éclore au moment propice…

Gilbert "Critikator" Jouin


Alex Vizorek est une oeuvre d'art

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Petit Hébertot
78bis, Boulevard des Batignolles
75017 Paris
Tel : 01 42 93 13 04
Métro : Villiers / Rome
Seul en scène écrit par Alex Vizorek
Mis en scène par Stéphanie Bataille

Présentation : Quel est le point commun entre la Musique, la Sculpture, le Cinéma ou encore l’Art moderne ? Alex Vizorek et son génie comique bien sûr !
Le nouveau phénomène de l’humour belge, chroniqueur à France Inter, vous parlera d’Art avec la folie qui le caractérise.
Magritte, Ravel, Visconti y côtoient Pamela Anderson et Julien Lepers. Un must pour les amateurs de gai savoir !

Mon avis : « Je suis Belge ! »… Dès son entrée en scène, Alex Vizorek tombe le masque. Pas de faux-fuyant, pas d’hypocrisie, il fait d’emblée son coming out. Mais, rassurez-vous, pas besoin de parler couramment le belge, on comprend parfaitement tout ce qu’il dit. Pire même, il n’a aucun accent. Alors qu’à la radio, on entend parfois poindre une certaine tonalité bruxelloise.
Le garçon est élégant, propre sur lui. Mini vague impeccable, chemise blanche parfaitement repassée, fine cravate noire. Mais, histoire tout de même d’afficher son statut revendiqué d’humoriste, il arbore une paire de chaussettes arc-en-ciel… Avec un vocabulaire précis et recherché, il adopte le ton un peu docte d’un conférencier. C’est que le thème de son spectacle est on ne peut plus sérieux puisqu’il s’agit de la Culture ; la Culture avec un grand « C »… comme Comique aussi…
Alex Vizorek réussit en effet cette gageure de prouver que l’on peut faire rire intelligemment avec un sujet noble et a priori austère.


En fait, il aborde les grandes disciplines de la Culture par le petit bout de la lorgnette. Il adore parsemer son propos de digressions habiles, de réflexions décalées et de commentaires fallacieux. Et puis il ne dédaigne pas s’autoriser ça et là quelques saillies grivoises (« de l’importance de glisser une blague de cul dans un exposé culturel »), ou quelques remarques gentiment misogynes. Il incorpore en outre, et fort à-propos, des jeux de mots qui s’avèrent, bien qu’il s’en défende, d’excellente facture. Enfin, manière aussi de dépoussiérer la Culture, il utilise à bon escient le name dropping. Si bien qu’aux côtés de sommités du monde de l’Art, on peut retrouver Nadine Morano, Marc Lévy, DSK, Céline Dion, Ribéry, Paris Hilton, Luis Fernandez…)


Comme tout bon conférencier qui se respecte et respecte le public, il illustre sa rhétorique avec une série de projections. Ce qui lui permet également d’installer une vraie interactivité avec le public. Ce qui l’amène à se livrer ainsi à un petit quiz participatif sur la peinture. A nous de décréter entre un tableau de Magritte et une scène coquine lequel des deux est une œuvre dard ?


Le spectacle d’Alex Vizorek est donc dûment découpé en chapitres qui sont autant de sketches : la Musique, la Peinture, la Sculpture, le Cinéma, la Chanson… Comme tout Belge, il a cette aptitude innée au non sens et au burlesque. Ses textes sont remarquablement écrits et fort bien documentés. Son adage de référence est une phrase de Malraux : « L’Art est le plus court chemin de l’homme à l’homme ». J’y ajouterai pour ma part  « surtout si ce chemin est balisé par l’humour »…
Mission accomplie pour Alex Vizorek. Avec beaucoup de finesse, il sait nous captiver et nous amuser avec une thématique peu facile ce en quoi il se démarque de la plupart des one-man shows humoristiques. C’est vraiment de la belle ouvrage.


Gilbert « Critikator » Jouin

Frero Delavega

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Sortie le 21 juillet 2014
Capitol Music / Universal Music

Personnellement, les Fréro Delavega (Jérémy Frérot et Flo De Lavega) étaient mon coup de cœur de la dernière saison de The Voice. J’avais espéré qu’ils aillent au bout. J’aimais leur fraîcheur, leur simplicité, leur joie de vivre communicative, leur plaisir de partager et, d’abord, j’aimais leur façon de chanter et le mariage de leur voix.
On sentait qu’ils en avaient « sous la semelle » et qu’ils n’auraient aucun mal à intéressser une maison de disques.

Leur premier album, éponyme, est donc sorti fin juillet.
On y retrouve tout ce qui fait le charme de ce duo. Ils sont un sens incroyable de l’harmonie. Leurs voix, naturellement mélodieuses, sont aussi complémentaires que fusionnelles. C’est doux, apaisant, positif, très agréable à écouter.


Pour moi, quatre titres se détachent d’un ensemble cohérent :
1/ Il y a. (pour sa construction : d’abord a cappella, puis discrète introduction d’une guitare, et enfin léger tapis de cordes. Le résultat est bluffant. C’est la meilleure des cartes de visite pour exposer la communion de leurs organes)
2/ Sur la route
3/ De l’autre côté

4/ Queenstone

Eric Clapton & Friends

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The Breeze
An Appreciation of J.J. Cale
(Polydor)

Du haut de son nuage sur lequel il s’est juché en juillet 2013, J.J. Cale a dû prendre un plaisir monstrueux à l’écoute de The Breeze, l’album hommage que lui ont concocté Eric Clapton and Friends.
L’ami de J.J., Eric « God » Clapton, alias « Slowhand », s’est entouré de la fine fleur des guitareux, tous sains de cordes et d’esprit, pour enregistrer 16 des meilleurs chansons de la plus discrète des rock stars.
J.J. Cale et Eric Clapton avaient en commun cette façon très nonchalante de chanter. d’interpréter et, bien sûr, chacun des guest stars s’est mis au diapason. Ainsi l’ambiance musicale de J.J. Cale est-elle parfaitement respectée.

Dès le premier titre de cet album, Call Me The Breeze, on est dans le ton : c’est tout en douceur tout en étant très rythmé. Si vous aimez le blues, le country blues et le blues rock, vous allez être au ciel. C’est tout simplement majestueux.
Le troisième titre, Someday, chanté et joué par Mark Knopfler est à la fois troublant et envoûtant. Un grand moment. De même dans le cinquième titre, Sensitive Kind, la partie de guitare est à tomber par terre. Déjà que le niveau, dans ce domaine, est très, très haut, c’est dire…


D’ailleurs, pour honorer la mémoire de J.J., ce ne sont pas moins de douze guitaristes qui sont venus prêter leur concours, et quels instrumentistes ! Outre Eric Clapton et Mark Knopfler, on retrouve en effet des pointures comme John Mayer, Willie Nelson, Don White, Albert Lee, et même une femme, Christine Lakeland.

Cet album est un pur bonheur. Il nous rappelle que J.J. Cale était un sacré mélodiste.

On peut tout juste regretter l’absence de titres comme After Midnight, Cocaïne ou I’ll Make Love To You Anytime qu’Eric Clapton avait déjà repris précédemment. Mais, honnêtement, sur le plan acoustique, c’est un régal.

Des gens intelligents

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Théâtre de Paris
(Salle Réjane)
5, rue Blanche
75009 Paris
Tel : 01 42 80 01 81
Métro : Trinité / Blanche / Saint-Lazare

Une comédie de Marc Fayet
Mise en scène par José Paul
Décors d’Edouard Laug
Lumières des Laurent Béal
Costumes de Brigitte Faur-Perdigou
Musique et illustration sonore de François Peyrony
Avec Lisa Martino (Chloé), Lysiane Meys (Marina), Marie Piton (Gina), Marc Fayet (David), Stéphan Wojtowicz (Alexandre), Gérard Loussine (Thomas)

L’histoire : David, qui est un garçon sensé et réfléchi, a décidé de se séparer de Chloé. Chloé, qui est une fille habile et déterminée, ne l’entend pas vraiment de cette oreille. Leurs amis, qui sont des gens prudents et attentionnés, sont un petit peu embêtés. C’est donc une histoire ordinaire et très originale, car tout est différent quand on est intelligent… ou pas.

Mon avis : En dépit de son titre, Des gens intelligents n’est pas qu’une simple histoire de QI… Même si, au niveau du texte, cette pièce est remarquablement écrite. On y entend des mots que l’on n’a pas coutume d’entendre sur une scène, à fortiori dans une comédie. Mais c’est là aussi une de ses principales qualités car elle nous tire vers le haut. L’auteur, Marc Fayet, qui tient également le rôle de David, a particulièrement soigné les dialogues. Et quand ils sont mis dans la bouche de comédiens qui s’investissent à fond dans leurs personnages, on boit du petit lait, on jubile.

Je ne pouvais pas mieux démarrer la rentrée théâtrale de la saison 2014-2015. En même temps, je ne prenais pas beaucoup de risques. Toutes les pièces écrites par Marc Fayet m’ont immanquablement comblé (Jacques a dit, L’un dans l’autre, Il est passé par ici, Le Scoop). Et comme comédien (24 pièces en 30 ans !), il a un jeu qui n’appartient qu’à lui. Autre de ses talents, et non des moindres, il sait aussi s’entourer. D’abord avec un metteur en scène, José Paul, qui signe ici sa quatrième mise en scène avec lui. Ce sont tous deux des artisans entièrement investis dans une mission unique : faire rire intelligemment.

Des gens intelligentss’avère en effet être une pièce chorale où (presque) tout le monde chante faux pour savoir un vrai qui n’existe peut-être pas… Elle met en scène trois couples, mais six personnalités. Marc Fayet a dessiné six caractères d’hommes et de femmes très différents. David est sûr de lui, macho, apparemment zen, mais son personnage va évoluer tout au long de la pièce pour devenir exalté et démonstratif… Alexandre est sûr de lui, macho, pragmatique, sceptique, et docteur émérite ès mauvaise foi… Thomas n’est pas sûr de lui, pas macho, doux, conciliant, sans problème…
Côté filles, Chloé est déterminée, maligne, c’est une joueuse d’échecs qui a toujours un coup d’avance sur Marc… Marina est tolérante, pleine de bon sens, positive, mais elle trompe son monde en jouant les nunuches alors qu’elle est extrêmement lucide… Gina est volcanique, méfiante, carrée (elle est Corse !), apparemment bien dans sa peau, mais elle dissimule une certaine vulnérabilité.


Pour la synthétiser, Des gens intelligents est une pièce sur le doute. Ce doute qu’on instille, soit sans le vouloir, soit sournoisement, dans la tête des autres. Un doute qui enfle comme une pièce montée, qui enfle sur du vide comme une pièce montée. On en vient ainsi à assister à des scènes de ménage virtuelles.
Cette comédie se déroule en douze tableaux qui s’enchaînent sans le moindre temps mort. Suivant le scénario à la lettre, José Paul y a mis un maximum de vivacité. On change d’appartement, mais on ne change quasiment pas de décor. Il n’y en n’a pas besoin. On gagne ainsi en rythme et en fluidité. Ce qui est cocasse et apporte un maximum de drôlerie, c’est que les comédiens ne sont jamais tous les six sur scène en même temps. On évolue en triplette, les trois hommes d’un côté, les trois femmes de l’autre, ou en couple. C’est très malin car on a droit ainsi à deux versions : la masculine et la féminine. Ça aussi ça ajoute pas mal de piquant…

Mais il ne faut pas trop en dire. Il faut se laisser porter. D’autant qu’au fil des tableaux, on voit se dessiner une fin qui ne peut être qu’apocalyptique… ou pas ! C’est tellement subtil.
Des gens intelligentsest une pièce de qualité, excessivement drôle (la scène de la soupe à la grimace entre Gina et Thomas est un grand moment de comédie), on pourrait même la qualifier de "virevoltante", et en parfaite harmonie avec son titre, très, très intelligente.

Quant aux comédiens ce sont six grands solistes, des virtuoses qui mettent leur talent à l’unisson pour nous offrir un spectacle absolument jubilatoire.

Gilbert "Critikator" Jouin

Le Dîner de Cons

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Théâtre de la Michodière
4bis, rue de l Michodière
75002 Paris
Tel : 01 47 42 95 22
Métro : Opéra / Quatre Septembre

Une pièce de Francis Veber
Mise en scène par Agnès Boury
Décors d’Edouard Laug
Lumières de Laurent Béal
Costumes de Juliette Chanaud
Musique de François Peyrony
Avec Patrick Haudecoeur (François Pignon), José Paul (Pierre Brochant), Grégoire Bonnet (Lucien Cheval), Patrick Zard’ (Juste Leblanc), Florence Maury (Christine Brochant), Anne-Sophie Germanaz (Marlène Sasseur), Stéphane Cottin (le docteur Sorbier)

L’histoire : Chaque semaine, Pierre Brochant, grand éditeur parisien, et ses amis organisent un dîner de cons…
Le principe est simple : chaque participant amène un « con ». A la fin de la soirée, celui qui a dégoté le plus spectaculaire est déclaré vainqueur. Ce soir, Brochant exulte ; il a déniché la perle rare, un con de classe mondiale : François Pignon, fonctionnaire au Ministère des Finances et fou de maquettes en allumettes.
Mais l’éditeur ignore que Pignon, prêt à tout pour rendre service, est passé maître dans l’art de déclencher des catastrophes !
La rencontre entre deux destins qui n’auraient jamais dû se croiser…

Mon avis : Ah le con ! Mais quel con !...
Il y a belle lurette que Le Dîner de Cons fait partie de notre patrimoine via ses différentes adaptations au théâtre (cinq) et son film. Plusieurs générations le connaissent quasiment par cœur… Un peu plus de vingt après sa création au Théâtre des Variétés, la pièce de Francis Veber revient donc sur la scène de la Michodière dans une toute nouvelle distribution. Même si on sait ce Con va voir, on y court pour découvrir à quel niveau sur l’échelle de Richter de la Connerie va se situer le François Pignon estampillé 2014. D’autant que Jacques Villeret, qui a joué deux fois la pièce et le film, avait mis le curseur presque en dehors des limites de tout contrôle technique.

Et bien Patrick Haudecoeur crée une sorte de Pignon-étalon. Un Concentré. Il est sans Concurrence. D’ailleurs, j’ai entendu Francis Veber déclarer dans une émission de radio que cette version de son Dîner était la plus fidèle à l’originale. Avec de  tels propos venant de son créateur, Patrick Haudecoeur hérite du statut de Con sacré. Et non pas de sacré con. Surtout pas. Car il le joue avec une telle finesse, un tel naturel et une telle humanité qu’il nous attendrit autant qu’il nous fait rire. Bref, ce Con plaît. Complètement. Il est Convaincant.


Il est donc inutile de raConter l’histoire. On arrive au théâtre de la Michodière en terrain connu. On y vient pour découvrir dans quels abîmes de désarroi Brochant va se perdre, emporté par ce tsunami qui lui veut du bien. Car Pignon est un Con bien, un Con-battant, un gentil Con. Il ne sait pas quoi faire pour rendre service à son hôte (il faut bien qu’un Con serve). Et plus il se dévoue, plus il déchaîne de catastrophes. Il devient totalement inContrôlable… Sur le plan simplement relationnel, avec Lucien Cheval, son collègue des Impôts, Pignon se révèle est aussi être un bon Compagnon, un Con-pote en quelque sorte. Donc Pignon a bon fond, c’est un brave homme qui, en plus, certes avec un temps de retard, a Conscience de ses bévues et des dégâts qu’il cause. Il ne sait pas quoi faire pour se rattraper et il envenime encore plus la situation.

Le Dîner de Consest une mécanique imparable, aux rouages parfaitement huilés. Certaines répliques deviennent totalement inaudibles tant les spectateurs rient. La fameuse scène de « Juste Leblanc » - un tube ! – se déroule sous les hoquets et les étranglements. Une telle communion, c’est un bonheur.


Mais pour que le Con-texte, pour que la sauce prennent, il faut qu’il y ait en face de l’incontrôlable Pignon un partenaire à la hauteur. José Paul compose un Brochant inaltérable, du moins au début. Car, petit à petit, sa suffisance va se déliter. C’est un rôle que l’on ne peut pas sur-jouer. Il faut être sans cesse dans la justesse ; que les mimiques, les réactions soient en permanence crédibles. Avec sa voix grave, son élégance naturelle, son sens de la comédie, son métier, son goût pour le partage, José Paul est le complice idéal de Patrick Haudecoeur. On connaît l’impact des duos antagonistes dans les comédies. C’est un truc qui marche si les rôles sont parfaitement assumés, si aucun des deux n’empiète sur le registre de l’autre. Patrick et José forment un vrai tandem… En outre, ce ne doit pas être évident pour José Paul de tenir toute la pièce en simulant un tour de reins et, surtout, on se demande comment il fait pour ne pas éclater de rire devant les facéties inénarrables de son partenaire.


Autour de ce duo, les autres comédiens tirent leur épingle du jeu. Mention particulière toutefois pour la composition de Grégoire Bonnet dans le rôle de Lucien Cheval. Son attitude lorsqu’il apprend son infortune fait hurler la salle de rire.

Cette pièce est logiquement partie pour durer un bon moment. C’est tout le bonheur qu’on leur souhaite. Après tout, lors d’un Dîner, il est logique que les Cons vivent…


Gilbert « Critikator » Jouin

Calogero "Les Feux d'artifice"

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Polydor / Universal Music

La seule chose qui m’ait intriguée dans le nouvel album de Calogero, c’est son titre, Les Feux d’artifice.
Le seul parallèle que j’ai trouvé avec les engins pyrotechniques qui fusent vers le ciel, c’est que cet opus est vraiment très aérien. Le son, le climat, la voix, tout contribue à nous emmener très haut.
Pour continuer dans la métaphore du « feu », ce n’est pas une œuvre qui éclate. Au contraire, c’est un feu doux, un feu qui lèche, qui réchauffe le cœur et, parfois, embrase l’âme. Ses flammes empruntent toutes les nuances du rouge. Du rose pâle du Portrait » au rouge sang de Un jour au mauvais endroit, en passant par le rose pastel de Avant toi.

Sinon, c’est un album dénué de tout « artifice », de toute fioriture. Calogero et le réalisateur-arrangeur Alan O’Connell ont gommé tout superflu pour n’aller qu’à l’essentiel avec un seul souci en tête : un esthétisme pur.
Le seul mot qui me vienne à l’esprit pour qualifier Les Feux d’artifice, c’est « efficace ». Cet album est efficace dans tous les domaines : les mélodies, les couleurs musicales, les paroles et, bien sûr, la voix…
J’ai rencontré et interviewé Calogero pour la première fois en… mai 90. Il n’avait pas encore 19 ans, il s’appelait encore Charly, il était le chanteur des Charts. Il portait alors de longs cheveux bouclés qui lui donnaient une allure angélique, romantique. Vingt-quatre ans plus tard, il a un peu perdu au niveau de la coiffure, mais il a gardé et dans son attitude et dans sa voix quelque chose de divinement céleste.

Habituellement, je m’efforce de dresser un classement des chansons dans un ordre préférentiel. Ici, ça m’a été totalement impossible. En plus, ces Feux d’artifice ne se terminent pas en bouquet final. C’est un bouquet du début à la fin.

J’ai beaucoup aimé l’écriture de chaque chanson. A chaque fois, c’est une écriture simple,
directe, imagée. On n’a pas besoin de réfléchir, les paroles vont droit au cœur. Car, à chaque fois, il y a du sens. Même si, personnellement, j’ai un faible pour Le Portrait, une chanson tendre, mélancolique et formellement belle, les onze autres titres m’ont plu et intéressé. Un jour au mauvais endroit, inspirée d’un fait divers survenu dans le village isérois natal de Calogero, Echirolles, est une chanson sensible et citoyenne, une chanson utile. Tout aussi utile est J’ai le droit aussi, magnifique ode à la tolérance et au droit à la différence.
Calogero, par auteur(e) interposés, évoque également l’évolution de la société dans notre vie de tous les jours dans Le monde moderne, avec pour thème principal les familles recomposées et la priorité qui doit être donnée aux enfants. C’est en homme concerné qu’il aborde ce sujet. Ici, l’écriture féminine de Marie Bastide apporte ce qu’il faut de douceur lucide.


J’ai aussi particulièrement apprécié, et avec beaucoup d’amusement, la chanson Conduire en Angleterre. Il y a tout ce que j’aime dans ce titre résolument british : une mélodie beatleisante, une bonne dose d’humour et d’autodérision, un arrangement original (grosse présence de la basse). C’est une chanson rebelle en hommage aux gauchers. J’ai aimé le jeu de mot avec les deux sens de « manche », le Channel et le manche de guitare, et l’abondance de rimes en « air » qui le rendent encore plus aérien. Bref, c’est une chanson adroite…

Il ne faudrait pas non plus occulter ces deux chansons d’amour que sont Avant toi et Elle me manque déjà. Placées ainsi à la suite l’une de l’autre, on a l’impression que la seconde développe la précédente. C’est très intelligent. Elles vont beaucoup, beaucoup plaire aux dames et aux demoiselles.

Et je terminerai par ce petit bijou qu’est La boîte à musique, un éloge de la danse classique. A travers le climat, la légèreté de la mélodie qui colle parfaitement au texte, la précision des mots, on VOIT les images. On la voit cette danseuse. Et puis, même les « la, la, la » sont magnifiques…


Voilà, tout ça pour dire que j’ai absolument a-do-ré ce nouvel album de Calogero. Grand artiste, beau chanteur, excellent mélodiste et remarquable musicien et, ça apparaît en filigrane tout au long de ces douze chansons, un homme concerné et engagé, un témoin de son temps. Une belle âme, quoi…

Georges et Georges

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Théâtre Rive Gauche
6, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 35 32 31
Métro : Edgar Quinet / Gaîté

Une comédie « conjugale » d’Eric-Emmanuel Schmitt
Mise en scène par Steve Suissa
Décor de Stéphanie Jarre
Costumes de Pascale Bordet
Lumières de Jacques Rouveyrollis
Création sonore de Maxime Richelme
Avec Davy Sardou (Georges et Georges), Alexandre Brasseur (Le docteur Galopin), Christelle Reboul (Marianne), Véronique Boulanger (La reine de Batavia), Thierry Lopez (Hercule Chochotte), Zoé Nonn (La Môme Crevette)

L’histoire : Après quelques années de vie commune, Marianne et Georges ne se supportent plus : elle regrette le Georges amoureux et naïf qu’elle rencontra, lui désire une femme plus pimentée. Grâce aux expériences du docteur Galopin, magnéto-thérapeute, ils vont chacun être mis en face de leur fantasme… Et devront le cacher à l’autre !
Le cauchemar commence…
Une comédie survoltée et hilarante, sous le signe de Georges Feydeau, où les quiproquos déclenchent surprises et fous rires. D’un appartement parisien jusqu’à l’ambassade du royaume de Batavia, les portes claquent sous la frénésie des six personnages qui s’évitent et se poursuivent.

Mon avis : Et bien, voici ma première déception de cette rentrée théâtrale 2014-2015. Et elle vient d’où je ne l’attendais pas.
J’avais effectivement hâte de découvrir cette pièce qui a débuté le 22 août. Hâte surtout de retrouver Davy Sardou dans un autre registre, celui de la comédie loufoque. Ses prestations dans L’Alouette et encore plus dans L’Affrontement m’avaient réellement emballé. L’affiche elle-même était alléchante : Eric-Emmanuel Schmitt à la plume, Steve Suissa à la mise en scène et des comédiens comme Christelle Reboul, Véronique Boulanger et Alexandre Brasseur… ça fleurait bon le succès annoncé.
Enfin, ce pitch qui nous présentait cette « comédie conjugale » comme « survoltée », « hilarante » et « frénétique », c’était une promesse de bonne soirée…


En plagiant Georges Feydeau, Eric-Emmanuel Schmitt a voulu s’exercer à la comédie de boulevard. Je crains qu’il ne se retrouve aujourd’hui plutôt dans une impasse. Il en a pris tous les ingrédients ; le rythme, des portes qui s’ouvrent et se ferment sans cesse (il y en a sept !), une abondance de quiproquos, des courses, des cris, de la confusion, de très beaux costumes… Il a tout secoué dans son shaker… Mais le cocktail qu’il nous fait déguster n’a pas le goût escompté. C’est du Canada Dry. Ça ressemble à du boulevard, c’est loufoque comme du boulevard, mais ce n’est pas du boulevard. C’est une grosse farce excessive en tout... A aucun moment, je ne me suis laissé happer par la pièce, je ne suis pas entré dedans.


Une seule chose m’a peiné et réconforté à la fois : les six comédiens n’ont absolument rien à se reprocher. Ils sont tous excellents dans les personnages qu’on leur a offerts de jouer. J’ai eu la confirmation du talent des quatre acteurs précités et j’ai découvert avec amusement la qualité de jeu de Zoé Nonn et de Thierry Lopez. Ils font tous le job avec une générosité débordante et un plaisir qui aurait dû être communicatif. Je me suis donc juste complu à apprécier leurs prestations. 
Mais ce n’est pas facile d’être un minimum crédible quand ce que l’on vous donne à interpréter est aussi outré, aussi décalé. Bien sûr, la chute de la pièce nous apporte les éléments manquants au puzzle de notre rationalité, mais c’est trop tard. Le mal est fait, et le mal court vite au théâtre (n’est-ce pas Audiberti ?). Très tôt il s’installe une sorte de déphasage entre la salle et ce qui se passe sur scène. En dépit de toute l’énergie déployée par les comédiens, les rires sont sporadiques, peu nombreux.

C’est bien une des premières fois que je sors déçu du Rive Gauche.
Maintenant, il existe sans doute un public à l’esprit moins cartésien que le mien…

Chambre froide

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La Pépinière Théâtre
7, rue Louis le Grand
75002 Paris
Tel : 01 42 61 44 16
Métro : Opéra

Une pièce de Michèle Lowe
Mise en scène par Sally Micaleff
Scénographie de Laura Léonard
Lumières de Jean-Philippe Viguié
Costumes d’Ariane Viallet
Avec Pascale Arbillot (Debra), Anne Charrier (Molly), Valérie Karsenti (Nicky), Philippe Carion, Pierre-Alain Leleu, Philippe Peyran Lacroix (les maris)

L’histoire : Le mari de Nicky est accusé de détournement d’argent, le mari de Molly la flique continuellement, le mari de Debra la quitte pour une autre femme plus riche… Quand les trois hommes, par inadvertance, se retrouvent enfermés dans la chambre froide au sous-sol, les trois femmes ont une décision à prendre…
Si vous aviez la possibilité de tuer votre mari, le feriez-vous ?

Mon avis : Voici une pièce jubilatoire à souhait. Acide, amusante, inquiétante, amorale, instructive… C’est une pièce écrite par une femme, mise en scène par une femme avec, en permanence sur la scène, trois femmes qui parlent de leurs problèmes de femmes.
 L’action – et il y en a ! – se déroule en toute logique dans l’endroit dédié aux femmes : la cuisine (je me venge comme je peux). Nicky, vient de servir le repas aux trois maris, installés dans le salon attenant. On n’entend que leurs voix. Ils ont l’air de bien s’amuser ; la plupart du temps au détriment de leurs épouses.
L’avantage, c’est que les trois jeunes femmes peuvent se parler en toute tranquillité. Depuis dix-huit ans, maris et femmes ont formé une bande qui se réunit une fois par semaine. Nicky, Debra et Molly sont donc de très bonnes amies. N’ayant quasiment aucun secret l’une pour l’autre, elles peuvent se dire les choses librement.

Dès le début de la pièce, on sent que la crise couve. Chacune d’elles a un grief à l’encontre de son conjoint. Mais la profondeur de leur ressentiment n’en est pas au même niveau. Nicky, très remontée contre son escroc de mari, souhaite ouvertement le voir disparaître de son univers. Sa détermination et ses arguments imparables tendent à fédérer ses deux copines. Si Molly adhère assez rapidement, Debra fait de la résistance. Pour le spectateur, c’est un régal que de suivre l’évolution mentale de nos trois héroïnes.
Chambre froide est un vrai suspense. Il est divisé assez nettement en deux parties. Dans la première, tant que les maris se trouvent dans le salon, Nicky joue au procureur, Debra à l’avocate de la défense, et Molly à la partie civile… Mais lorsque les trois hommes se retrouvent bêtement prisonniers de la fameuse chambre froide, le rythme s’accélère brutalement, les cris s’intensifient, la tension approche de son point culminant.
Et nous, dans la salle, on se demande bien comment tout cela va se terminer… Happy end, ou pas happy end ?... Vous le saurez en vous rendant à la Pépinière Théâtre.


Chambre froide, c’est trois superbes portraits de femmes. Machos indécrottables, s’abstenir… L’auteure s’est attachée à brosser trois caractères très différents, très affirmés. Pour des comédiennes, ce doit être un grand bonheur que de s’approprier des personnages aussi forts.
Nicky (Valérie Karsenti), c’est la femme forte, la femme de tête au caractère bien trempé. Dotée d’un cynisme que l’on pourrait qualifier de « masculin », son dégoût de son mari l’a totalement radicalisée… Molly (Anne Charrier), est à la fois candide et maligne. Elle a gardé une espèce d’insouciance juvénile qui l’amène à positiver et la pousse à la tolérance. C’est une bonne vivante qui mène tranquillement son petit « bonne-femme » de chemin… Debra (Pascale Arbillot), c’est l’opposé de Nicky. Psychorigide, elle veut se convaincre d’être encore amoureuse, elle ne supporte aucune compromission.

Leur opposition, à une contre une, à deux contre une, est absolument passionnante. Elles vont nous tenir ainsi en haleine jusqu’à la fin.
Pascale Arbillot, Anne Charrier et Valérie Karsenti s’en donnent à corps et à cœur joie. Elles ne s’économisent pas une seconde. Elles sont à fond dans leur personnage. Elles nous offrent un grand moment de comédie.
Au-delà de la simple comédie, quelques messages sont savamment disséminés tout au long de la pièce et peuvent donner à réfléchir sur la condition de la femme. Les thèmes essentiels de la vie de couple y sont abordés. Et on ne peut pas dire que les hommes y ont le beau rôle. Ceratis, mauvais joueurs, vont sans doute trouver les propos de Michèle Lowe, l’auteure, trop manichéens. C’est vrai, ici, les femmes sont les gentilles et les hommes sont les méchants.
Mais est-ce éloigné tant que ça de la vie réelle ? C’est à chacun d’apprécier, voire de se remettre en cause…

Gilbert "Critikator" Jouin


Bénabar "Inspiré de faits réels"

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Sony Music



Tout est annoncé dans le titre de l’album… Chacun des douze titres est « inspiré de faits réels ». Ce qui ne veut bien sûr pas dire qu’il a vécu tout ce qu’il raconte

C’est à la fois un conteur, un chroniqueur et un croqueur. Bruno Bénabar est un observateur et un acteur d’un quotidien qu’il trouve « vertigineux », un témoin de son temps. Dans cent ans, les ethnologues n’auront qu’à écouter ses albums pour savoir comment on vivait dans la France du début du 21è siècle.
L’écriture de Bénabar est simple et directe, accessible à tous. A ce niveau, je trouve qu’il ressemble, l’argot en moins, de plus en plus à Renaud. Par exemple Remember Parism’a furieusement fait penser à It Is Not Because You Are et, à travers la relation entre le père et son enfant, j’ai trouvé dans Titouan un petit côté Mistral gagnant.


De toute évidence, Bénabar n’aime pas la gravité. Il préfère les thèmes légers, les contre-pieds (Belle journée et Coming In), les happy end (La grande vie, Les deux chiens). Où il est semble-t-il le plus à l’aise, c’est lorsqu’il peut teinter ses textes d’humour (Gilles César), d’ironie et d’autodérision (Paris By Night). Plus inattendus sont son utilisation de la métaphore (La forêt) et de l’exercice de style (Les couleurs). Au moins, il ne reste pas confiné dans un seul mode d’expression. Pour tout un album, c’est préférable.

On ne peut pas dire en revanche que Bénabar soit un grand compositeur. On écoute plus ses textes que ses mélodies. Mais il a ce talent de savoir les mettre en valeur avec les arrangements. Personnellement, je trouve que le swing lui va parfaitement. C’est pourquoi, parmi mes chansons préférées figurent Paris By Night, Remenber Paris et Sur son passage. Cette dernière étant à tout point de vue une belle réussite. Elle est tellement vraie !
Gilles César, chanson sans prétention mais maline, m’a beaucoup amusé.
On sent que Bénabar est sensible aux femmes. Il les aime, les respecte, les comprend (Sur son passage) et les craint parfois (Le regard, une des plus abouties sur le plan de l’écriture)
Il s’en sort également avec brio dans Titouan, une chanson dont l’intention n’était pas évidente à transcrire. Il y a en effet en parallèle deux actions qui se déroulent simultanément : ce qui se passe dans sa tête (sa rupture) et ce qu’il vit en temps réel et qui doit requérir toute son attention, la garde de son petit garçon. En plus l’idée de la traiter uniquement en piano-voix ajoute une authentique intensité. Beau boulot !



Voilà. Dans Inspiré de faits réel, Bénabar a fait du… Bénabar. N’est-ce pas finalement ce qu’on attend de lui. Ceux qui l’apprécient, vont continuer à l’apprécier. Et ceux qu’il n’inspire guère vont continuer à l’ignorer. Mais, au moins, il ne se déjuge pas. Il continue son petit bonhomme de chanson. Ce garçon est « inspiré », et ça, c’est un « fait réel »…
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